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Dans les coulisses des brasseries valentinois : traditions brassicoles bien vivantes !

25/09/2025

Les méthodes traditionnelles : pour bien commencer, de quoi parle-t-on ?

Avant de pousser la porte des brasseries, petit éclaircissement sur ce que l’on entend par “méthodes traditionnelles”. Il ne s’agit pas de tirer une bière à la tireuse vintage du grand-oncle (quoique…), mais bien du respect de techniques historiques de brassage :

  • Empâtage par infusion (et non décoction industrielle express)
  • Fermentation haute en cuves ouvertes — Oubliez la cuve inox vulcanisée !
  • Levures auto-sélectionnées : ces petites travailleuses locales réutilisées génération après génération
  • Conditionnement en bouteille ou fûts bois plutôt qu’en canette pasteurisée
  • Utilisation d’ingrédients du coin : orge, houblon, eau, parfois même épices ou fruits de la région

Ce sont ces critères qui dessinent la frontière entre brasseries “industrielles” ou simplement modernes, et ces petits sanctuaires où la bière reste une œuvre artisanale, à chaque étape.

Valence et la Drôme : une vieille histoire de mousse, d’artisanat et de transmission

Pas de secret : la Drôme ne s’est jamais hissée sur les podiums de la production brassicole française, mais elle a toujours su garder son ancrage rural et artisanal. Dès le XIXe siècle, le tissu de micro-brasseries locales rivalisait d’ingéniosité, entre innovations venues de Suisse (eh oui, nos voisins n’étaient pas que les rois du chocolat !) et adaptations aux réalités agricoles de la vallée du Rhône.

Les années 1990 ont vu refleurir ces brasseries artisanales, alors que dans le même temps l’industrie fermait les robinets sur la diversité. Aujourd’hui, plus d’une dizaine d’acteurs locaux font vivre la tradition autour de Valence (Bière Artisanale France). Mais qui sont-ils réellement à perpétuer les gestes du passé ?

Tour d’horizon : ces brasseries valentinois qui font vibrer la tradition

Brasserie La Valentinoise : cuves ouvertes et secrets de levures

Située à deux pas du Rhône, la Brasserie La Valentinoise est presque devenue un mythe local. Ici, on revendique le maintien de la fermentation haute en cuves ouvertes, un procédé rare, hautement exigeant, qui donne aux bières un caractère unique. Pour Michel, brasseur et maître des lieux, “l’important, c’est que les levures respirent. Une bière qui voit la lumière et sent l’air, ça vous donne des arômes que l’industriel ne pourra jamais copier !”

Véritable laboratoire à levures, la Valentinoise conserve d’ailleurs un souchier où l’on retrouve une dizaine de souches naturelles prélevées dans la région. Ces levures auto-sélectionnées, souvent issues de fermentations sauvages (purifiées, rassurez-vous !), confèrent personnalité et authenticité aux brassins.

Brasserie du Haut-Plateau : l’orge de la ferme à la bouteille

La force de la Brasserie du Haut-Plateau, installée à Peyrus, réside dans sa capacité à boucler la boucle locale. L’orge est cultivé sur le domaine familial, malterrifié à l’ancienne (air chaud, pas de touraillage industriel), et infusé dans des cuves en acier émaillé héritées des années 50.

  • Infusion traditionnelle par paliers (pas d’automatisation totale)
  • Pas de stabilisateurs chimiques ni d’enzymes industrielles
  • Bière refermentée en bouteille, sans filtration stérile
  • Production à moins de 1 000 hl/an (source : Brasserie Haut-Plateau)

Ici, chaque lot est unique, et la bouteille affiche l'année de récolte de l’orge, à la manière d’un petit millésime local.

Brasserie La Carburation : la chauffe au feu bois, ça existe encore ?

Laboratoire d’expérimentation et brasserie urbaine à Guilherand-Granges, la Carburation a fait le choix de chauffer son moût au feu de bois (oui, oui, comme au 19ᵉ siècle !). Si ce procédé requiert patience et doigté (et quelques brûlures du brasseur), il apporte des notes toastées et une complexité que les procédés modernes n’atteignent guère.

Pas d’automatisme ici, mais une brasserie presque théâtrale : les visiteurs assistent à l’embrasement des fours et au chant du cuivre, pour des brassins limités (autour de 350 litres par semaine).

La Brasserie Chevalier : la barrique… plus qu’un clin d’œil

Depuis 2017, la Brasserie Chevalier, nichée à quelques kilomètres de Valence, a remis à l’honneur l’élevage en barrique, tradition presque oubliée dans la région. À l’origine, le moût était entreposé dans d’anciennes barriques à vin. Aujourd’hui, certaines cuvées, en particulier les bières “saison” ou ambrées, passent de longs mois en fûts de chêne.

  • Apport d’oxygène contrôlé pour l’évolution aromatique
  • Assemblages issus de plusieurs millésimes, à la façon des grands vins
  • Bouteilles numérotées, éditions ultra limitées

On ne s'y trompe pas : ici, on ne parle pas seulement d’une bière, mais d’un héritage re-patiné chaque année.

Ce que ça change dans le verre… et dans le palais

On pourrait croire que la tradition, c’est surtout du folklore, mais dans le verre, la différence saute au nez et à la bouche. Qu’apporte vraiment le brassage “à l’ancienne” versus le tout-inox ? Quelques points clés :

  • Singularité aromatique : Les levures maison, le contact avec le bois ou l’oxygène, apportent des notes que même le plus génial des maîtres-brasseurs ne pourrait simuler en laboratoire
  • Complexité gustative : L’absence de “nettoyage” (filtration stérile, pasteurisation) préserve les arômes secondaires, les esters fruités et parfois même une pointe d’acidité naturelle
  • Vieillissement : Les bières refermentées en bouteille, les élevages en barrique, autorisent la garde sur plusieurs années, avec une évolution qui rappelle celle des grands vins — amateurs de verticales, à vos verres !

Mais attention : la tradition, c’est aussi accepter la part de l’incertitude et des micro-lots différents. Autant dire qu’ici, chaque dégustation a un petit goût d’aventure.

Pourquoi toutes les brasseries ne perpétuent-elles pas ces pratiques ?

Si certains continuent à lever haut l’étendard artisanal, la tendance lourde du secteur, en France comme ailleurs, reste à la modernisation. Pour rappel, selon le Syndicat National des Brasseurs Indépendants, plus de 92 % des brasseries artisanales françaises utilisent aujourd’hui des fermenteurs inox totalement fermés (source : SNBI).

Les raisons sont multiples :

  1. Contraintes sanitaires : Les systèmes ouverts ou peu filtrés augmentent le risque de contamination. Les contrôles sont plus poussés, les pertes parfois importantes.
  2. Production limitée : Difficile de garantir une régularité industrielle, ou simplement de produire en grande quantité.
  3. Coût et main d’œuvre : Ces méthodes sont chronophages — une cuvée “barrique” dort parfois un an avant d’être mise en bouteille !
  4. Formation nécessaire : La transmission des savoir-faire s’essouffle. Il reste heureusement quelques irréductibles… et quelques jeunes loups décidés à réinventer la tradition.

Faire le choix du brassage traditionnel, c’est souvent aller à contre-courant, mais avec la certitude d’offrir une expérience singulière.

Brasseries engagées : tradition ET inventivité ?

La bonne nouvelle, c’est que la tradition n’empêche pas la créativité, bien au contraire ! Plusieurs brasseries valentinoises allient méthodes héritées et brassins éphémères, cueillant ici des baies de genévrier de la vallée, là des houblons fraîchement récoltés chez un voisin, ou encore expérimentant de vieilles recettes exhumées de carnets jaunis.

Cette recherche de l’équilibre entre fidélité et innovation, ancrage local et ouverture sur le monde, fait la vitalité de la scène brassicole de Valence — et donne envie à chacun de (re)découvrir ces adresses.

À consommer sans modération… de curiosité !

Difficile de dresser un panorama exhaustif, tant la mosaïque des artisans évolue vite. Ce qui ne bouge pas, c’est cet attachement aux gestes simples : toucher de la main la bassine de moût, surveiller la mousse qui monte, échanger le soir sur la dernière brune ou saison issue des cuves historiques.

Pour qui poussera la porte d’une brasserie valentinois traditionnellement ancrée, la récompense sera toujours au rendez-vous : une bière à la typicité affirmée, un accueil à taille humaine, et souvent quelques histoires à raconter aux copains.

Une certitude : dans la Drôme, la tradition n’est pas un musée, mais une aventure en perpétuel mouvement, à déguster et partager.

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