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La magie brassicole de Valence : Héritage et empreintes laissées par ses brasseries pionnières

29/09/2025

L’âme de la bière valentinois : un patrimoine en mosaïque

En déambulant dans Valence, difficile d’imaginer que, bien avant l’essor des bars branchés ou des growlers à emporter, la ville était déjà portée par une scène brassicole énergique. Les brasseries artisanales historiques ont longtemps rythmé la vie locale et ce, depuis le XIXe siècle. Pourtant, si certains noms se sont effacés des étiquettes, leur héritage, lui, continue de fermenter dans chaque pinte servie aujourd’hui.

Mais alors, quelle place ces pionniers du houblon valentinois occupent-ils dans la tête et le cœur des brasseurs modernes ? Quelques indices bien mousseux, des anecdotes à savourer, et des traces indélébiles dans le paysage gustatif local.

Quand la Drôme brassait « à s’en faire mousser » : les grandes heures valentinois

Difficile de parler de la bière à Valence sans évoquer ses acteurs historiques. Rappelons-le : tout commence au XIXe siècle, quand la Drôme fourmillait de petites brasseries familiales, souvent créées par des immigrants autrichiens et allemands. À cette époque, on recense jusqu’à 13 établissements à Valence même (source : Archives municipale de Valence).

  • Brasserie La Valentine (créée en 1850, rue des Alpes), l’une des plus anciennes, célèbre pour sa lager douce et florale.
  • Brasserie de l’Union (fondée en 1887, avenue Victor Hugo), réputée dans toute la région, avant sa fermeture en 1935.
  • Brasserie Chabert, au début du XXe siècle, qui sera le premier établissement à investir dans une chaîne d’embouteillage mécanisée à Valence.

Le pic de production de la ville aurait été atteint vers 1905, avec près de 42 000 hectolitres brassés annuellement (source : “Vieille Brasserie de la Drôme”, Éditions La Taillanderie, 2007). Une vraie petite capitale de la blonde et de la brune !

Brasser pour le peuple : la bière au cœur du tissu social valentinois

Ce qui faisait la force (et la mousse) de ces brasseries ? Leur ancrage dans la vie quotidienne. La majorité des ouvriers de Valence, des étudiants ou des petits commerçants avaient leur « bière de quartier » attitrée, souvent livrée en fûts pour les grandes fêtes ou les premiers tournois sportifs de la ville.

  • Des saveurs uniques : Le terroir local, l’eau de la Drôme, le climat de la vallée du Rhône donnaient aux bières valentinois une personnalité bien trempée – souvent plus maltée et moins houblonnée que les blondes alsaciennes.
  • Des recettes familiales jalousement gardées : Certaines sont restées secrètes, transmises de génération en génération et remises à l’honneur aujourd’hui par quelques brasseurs passionnés.
  • Des liens forts avec la vie associative : Tournois de boules, festivals estivaux et bals populaires étaient souvent arrosés de bières locales, tissant un lien entre boisson et moments de partage.

Dans les années folles, Valence rayonnait avec un style tout à fait à part, où la bière était synonyme de rendez-vous, de convivialité et d’amour du terroir. Il n’était pas rare de voir, sur la façade des brasseries valentinois, des affiches clamant : « Ici, la mousse vient d’à côté ! »

Un âge d’or… et l’incontournable déclin

Comme dans beaucoup de régions françaises, l’histoire ne fut pas qu’une joyeuse ribambelle de chopes levées. La montée en puissance des grands groupes industriels, la standardisation des goûts et la Seconde Guerre mondiale ont peu à peu sonné le glas pour les brasseurs locaux.

De la quarantaine de brasseries artisanales recensées dans la Drôme au début du XXe siècle, seules deux subsistaient encore dans le Valentinois en 1960. L’arrivée de la bière industrielle, produite à moindre coût et diffusée à l’échelle nationale, portait un coup sévère au savoir-faire local (source : “Petite histoire de la bière en Rhône-Alpes”, Musée de la Bière à St-Nicolas-de-Port).

Dans l’ombre, une poignée d’irréductibles continuait à brasser « à l’ancienne », mais l’âge d’or semblait enterré sous des hectolitres d’uniformité industrielle.

Le retour du local : quand les jeunes brasseries s’inspirent des aînés

Attention, happy end en vue ! Dès les années 2000, la vague des microbrasseries déferle sur la Drôme, redonnant au secteur son effervescence première. À Valence, plusieurs établissements assument fièrement un héritage local dont ils s’emparent avec créativité.

La Brasserie du Cours, les Fazzi, Les Babouins de la Canopée, ou encore Brasserie Artisanale de la Pleine Lune (à Chop/Livron, portée par un maître-brasseur valentinois) s’inspirent largement des recettes historiques, actualisent les styles et revalorisent l’approche artisanale.

Que reste-t-il de ces pionniers dans nos verres aujourd’hui ?

  • Le savoir-faire brassicole : Des techniques de fermentation traditionnelles aux usages du malt local, les « jeunes pousses » valentinois reprennent l’essence du travail de leurs ancêtres.
  • Un vrai goût du terroir : Certaines brasseries réintroduisent des variétés régionales d’orge et de blé du Dauphiné, et travaillent avec les malteurs de la Drôme et de l’Ardèche (source : Chambre d’Agriculture de la Drôme).
  • L’influence des styles anciens : L’ambre, la triple façon « Valentine » ou la brune façon « Chabert » font régulièrement leur apparition sur les cartes de bière, version revisitée.

On retrouve également la notion de partage, réactualisée sous forme de taprooms, d’ateliers de brassage collaboratif, ou de la participation à des événements régionaux comme la Fête de la Bière de Valence.

Ces petites histoires qui brassent plus large : anecdotes et transmissions

Le patrimoine brassicole valentinois n’est pas seulement fait de litres et de recettes : il est aussi truffé d’anecdotes et d’histoires colorées, qui ajoutent de la mousse à toute dégustation.

  • Le brasseur Jules Renaud, en 1911, fut le premier à expérimenter en Drôme les houblons locaux séchés au soleil, ce qui lui valut d’être moqué par ses confrères, avant d’être imité…
  • La Brasserie de l’Union employait exclusivement des femmes cubières pour le lavage des bouteilles, gage, paraît-il, de propreté exemplaire ! (source : Archives municipales)
  • Dans certains villages alentour (Beaumont-lès-Valence, Bourg-lès-Valence), une tradition voulait qu’on vienne récupérer la levure « secrète » chaque samedi à la brasserie du chef-lieu, pour une tournée de pain et de bière maison.

De la transmission à l’évolution : l’héritage valsé en mode contemporain

La scène actuelle doit beaucoup à cette mémoire vive. Voici comment elle continue d’influencer la dynamique régionale :

  1. Formation et mentorat : Plusieurs brasseries valentinois ont tissé des liens avec les descendants des “grands anciens”, véhiculant conseils, astuces, et passion du produit.
  2. Culture collaborative : Qu’il s’agisse de collaborations entre brasseries ou de soutien à la création de houblonnières locales, cette dimension collective fait pleinement partie de la nouvelle vague.
  3. Sensibilisation des consommateurs : De nombreuses initiatives de découverte ou d’ateliers pédagogiques puisent dans l’histoire locale pour initier à la bière autrement.

Il existe d’ailleurs chaque année, au sein de la Fête de la Bière, un concours “recette du passé” où les brasseurs revisitent les bières à l’ancienne retrouvées dans les carnets de recettes de la région.

Quant aux consommateurs valentinois, leur appétit pour les bières différentes, les histoires de brasseurs et les saveurs singulières n’a jamais été aussi fort. En témoignent la quinzaine de brasseries artisanales actives aujourd’hui autour de Valence (source : Annuaire France Bière), un chiffre multiplié par dix depuis 2005 !

Vers une scène brassicole qui mêle patrimoine et audace

Qu’on se le dise, Valence n’a pas fini d’écrire sa légende autour de la bière locale. Grâce à ses brasseries artisanales historiques, la ville a forgé une identité brassicole forte, nourrie de passion, de partages et de récits à foison.

La nouvelle génération s’empare de cet héritage pour innover, tutoyer d’autres styles, travailler main dans la main avec les producteurs locaux… et garder en mémoire ceux qui ont, un jour, versé leur cœur dans une cuve de cuivre ou de bois. Et demain, il n’y a guère de doutes : chaque gorgée bue à Valence résonnera d’un passé vibrant, mais aussi d’un futur plein de mousse et de promesses.

À suivre… en terrasse ou au détour d’une nouvelle dégustation.

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